Depuis le 5 décembre 2019, les travailleurs français battent le pavé. Les syndicats sont vent debout contre la réforme du système de retraite initié par le Président Emmanuel Macron. Quels sont les changements introduits par cette réforme ? Pourquoi cause-t-elle autant de frictions ? Décryptage d’une réforme qui fait grincer tant de dents.
Une promesse de campagne du Président Emmanuel Macron
Cette mesure très controversée était prévue dans le programme électoral qui a conduit à l’élection d’Emmanuel Macron en 2017. Le candidat l’avait présentée comme une réforme essentielle, qui créerait plus de justice. L’idée est d’établir un système universel avec des règles communes dans le calcul des pensions. Il s’agissait de garantir le droit à l’égalité, remis en cause par l’existence de 42 systèmes différents, dont les régimes spéciaux.
Les régimes spéciaux sont des systèmes assortis de conditions spécifiques et très souvent avantageuses, comme un âge de départ à la retraite plus précoce. Ces régimes spéciaux couvrent des professions à usure physique ou à risques particuliers (marins, cheminots, notaires, etc.).
Un nouveau système de retraite par points
La réforme maintient le système de distribution public actuel, c’est-à-dire que les travailleurs en activité paient pour les retraités. En plus de fusionner les 42 régimes actuels en un seul, la réforme comprend un système de points.
Dans ce système, les travailleurs accumuleront des points dans leurs comptes individuels tout au long de leur vie professionnelle. Une fois la retraite atteinte, cela permettra de calculer la pension de sorte que chaque euro coté accorde les mêmes droits, quel que soit le statut.
Une réforme inopportune pour Yannick Tizon de la CGT
Les opposants à la réforme indiquent qu’il n’y a pas d’urgence particulière à réformer le système de retraite français qui est l’un des traits de l’identité française. En dépit des déficits qui pourraient frôler les 10 milliards d’euros, dans la prochaine décennie, ils estiment que le système marche bien.
Pour justifier leur position, les opposants à la réforme des retraites brandissent un certain nombre de chiffres. Le taux de pauvreté des plus de 65 ans en France est de 3,4%, et c’est l’un des plus bas des pays de l’OCDE. En Allemagne, il est de 9,6% et en Espagne de 9,4%. Le revenu des retraités français représente 103 % du revenu moyen de la population française en général.
Grâce à la retraite anticipée et à l’espérance de vie élevée, les Français arrivent en tête du classement de l’espérance de vie des retraités : 22,7 ans pour les hommes et 26,9 ans pour les femmes. Les dépenses pour les retraites représentent 14% du PIB contre 10,1% en Allemagne et 11% en Espagne. La moyenne pour les pays de l’OCDE est de 7,5%.
Le système français de demain, ce sera le travail à la petite semaine, ni plus ni moins.
Yannick Tizon, secrétaire général CGT Cheminots Bretagne
Un système qui pourrait accroître l’injustice sociale pour l’économiste Thomas Piketty
Pour Thomas Piketty, un système de retraite acceptable devrait être beaucoup plus favorable pour ceux qui touchent le salaire minimum. Au lieu de demander aux plus riches de faire des efforts, la réforme introduite par Emmanuel Macron fait exactement le contraire.
Sur ce point, le journal Mediapart et ses employés rejoignent Thomas Piketty. Mediapart estime que cette réforme est trop favorable aux salariés les plus riches et les entreprises qui les emploient.
Ainsi, selon les calculs de l’Institut de protection sociale, un salarié payé à 27.000 euros par mois devrait économiser environ 10.500 euros par an. Or, ceux qui gagnent le SMIC devront débourser 0,12% de plus qu’aujourd’hui.