L’annonce récente par Emmanuel Macron, au sujet de l’instauration d’une taxe sur les livres d’occasion a suscité un vif émoi parmi les amateurs de littérature et les professionnels du secteur. En effet, lors d’une visite éminente au Festival du livre de Paris en avril dernier, le Président de la République a ouvert la voie à une « contribution » qui vise à protéger le prix unique du livre neuf tout en soutenant financièrement auteurs, éditeurs, et traducteurs. Cette mesure, si elle venait à être appliquée, impacterait-elle réellement le coût des ouvrages de seconde main ? Examinons les faits.
Impact de la taxe sur le marché des livres d’occasion
Lorsque le chef d’État a évoqué la possibilité d’une telle taxe, il n’a pas seulement suscité l’intérêt, mais également une certaine inquiétude quant à l’accessibilité de la lecture pour les tranches de population les moins nanties. En théorie, l’ajout d’une taxe entraîne inévitablement une hausse des prix. Vincent Montagne, à la tête du Syndicat national de l’édition (SNE), a toutefois apporté une nuance importante lors de son intervention sur France Culture, précisant que cette mesure viserait principalement les grands acteurs internationaux du marché, comme Amazon ou eBay, qui, selon lui, échappent à l’imposition en France.
Cette distinction est cruciale car elle suggère que les ouvrages vendus par des associations ou des bouquinistes locaux ne seraient pas affectés. L’objectif serait de plafonner cette taxe à 3 % du prix de vente, soit une augmentation estimée entre 20 et 30 centimes par livre — une hausse modeste destinée à financer les créateurs et contributeurs du livre. Cette précision implique que pour les lecteurs préoccupés par les impacts fiscaux sur leurs achats, comprendre les implications de cette taxe pourrait leur permettre d’adapter leurs habitudes d’achat en conséquence.
Le soutien au livre neuf par la taxe sur le marché d’occasion
L’idée sous-jacente à la proposition de taxe, au-delà de l’aspect financier, réside dans la protection du prix unique du livre et le soutien au réseau traditionnel de distribution de livres neufs. Emanuel Macron et son gouvernement argumentent que cette « contribution » permettrait de rééquilibrer la compétition entre le marché du neuf et celui de l’occasion, ce dernier ayant connu une croissance notable ces dernières années, notamment avec l’émergence de plateformes en ligne dominées par de grands groupes internationaux.
Rachida Dati, ministre de la Culture, bien que discrète sur le sujet, n’a pas contesté cette orientation. La perspective est de voir ces fonds supplémentaires redistribués aux acteurs de la création littéraire, garantissant ainsi une juste rémunération pour leur travail. Curieusement, cette nouvelle n’a pas provoqué de levée de boucliers au sein du secteur de l’édition, ce qui pourrait témoigner d’une reconnaissance implicite des défis posés par la concurrence des vendeurs de livres d’occasion en ligne.
Les réactions du public et des professionnels
Bien que l’initiative puisse sembler bénéfique pour les créateurs de contenu et les éditeurs, elle n’en demeure pas moins controversée. La critique principale porte sur le fait que cette mesure pourrait rendre la lecture moins accessible pour certaines populations, notamment celles disposant de moyens financiers limités. Il semble donc essentiel de trouver un juste milieu entre le soutien nécessaire aux auteurs et aux éditeurs et la préservation de l’accès à la culture pour tous.
D’un autre côté, Vincent Chabault, sociologue, a mis en lumière dans son ouvrage Le Livre d’occasion. Sociologie d’un commerce en transition, l’ampleur et l’évolution du marché du livre d’occasion en France, soulignant ainsi son importance croissante pour les consommateurs français. Avec environ 9 millions d’acheteurs de livres d’occasion et près de 80 millions de livres achetés en seconde main en 2022, ce segment représente un maillon essentiel de la chaine de valeur du livre.
Prospective sur l’avenir du livre d’occasion
La proposition de taxe sur les livres d’occasion par Emmanuel Macron demeure, à ce stade, une annonce. L’incertitude quant à sa concrétisation et aux modalités précises de son application persiste. Cependant, il est clair que la dynamique du marché du livre en France est à un tournant. Les enjeux liés à la digitalisation, à la concentration des acteurs majeurs du commerce en ligne, et à la nécessaire protection de la création culturelle française dictent une réflexion profonde sur les meilleures stratégies à adopter.
Nous sommes à un point où le dialogue entre les différentes parties prenantes du monde du livre – auteurs, éditeurs, distributeurs, vendeurs d’occasion, et lecteurs – se révèle crucial. Une approche collaborative permettrait de soutenir efficacement la création littéraire tout en préservant l’accès à la lecture pour le plus grand nombre, reflétant ainsi un équilibre entre les impératifs économiques et culturels de notre société.